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Au Tchad, un ex-ministre du pétrole inculpé pour corruption et détournements: mais où est donc passé l’argent du pétrole ?

L’ancien ministre tchadien du Pétrole et de l’Energie Djerassem Le Bemadjiel a été inculpé et placé sous mandat de dépôt, le 4 septembre 2020, pour corruption et détournement de fonds publics entre 2013 et 2016, a indiqué, le ministre tchadien de la Justice.

Faux contrats de pétrole !

Dans sa plainte, l’Inspection générale d’Etat (IGE) met notamment en cause le ministre pour des « irrégularités » dans la passation de conventions et des facturations en 2013 et 2014 en faveur de deux cabinets d’audit, Alex Stewart International (ASI) et Cameroun Audit Conseil (CAC). Mais certains y voient un règlement de comptes politique, car l’IGE est directement rattachée aux services du Maréchal Idriss Déby, président depuis près de 30 ans.

Pour son avocat, l’ancien ministre du Pétrole a été victime d’une « arrestation arbitraire ». Selon Maître Doumra Manace, « c’est le seul ministre tchadien qui a réussi à faire annuler un faux contrat de pétrole », faisant payer à la compagnie chinoise CNPC « plus de 400 millions de dollars américains » en renégociant le contrat.

Règlement de comptes ou bouc émissaire ? Ce qui est clair, c’est que le secteur du pétrole au Tchad est loin de l’être, comme le dénonçait en 2008 la Banque mondiale.

Mais où est donc passé l’argent du pétrole ?

A l’époque, le gouvernement s’était engagé à affecter 70% des revenus pétroliers à la réduction de la pauvreté et à un fonds pour les générations futures. A ces conditions, la Banque mondiale avait accepté de financer un oléoduc permettant l’acheminement du pétrole produit dans le sud-est de N’Djamena jusqu’au Golfe de Guinée. Mais en 2008, la Banque a supprimé son aide, reprochant au pouvoir de ne jamais avoir respecté ses engagements.

Le Tchad, devenu exportateur net de pétrole en 2003, avec une moyenne de 140 000 barils/jour est un acteur relativement mineur sur le continent africain. Mais l’industrie pétrolière représente tout de même 75% des revenus d’exportation et 37% des recettes budgétaires en 2019. Un peu moins depuis la chute des cours ces dernières années.

En 2010, le ministre tchadien de l’Information Hassan Sylla Bakari dressait même un bilan flatteur : « Le pétrole a permis que le Tchad, en quelques années seulement, puisse faire un bond extraordinaire dans l’émergence. Hôpitaux, lycées, forages, châteaux d’eau, tout ce qui a été construit fait la fierté des Tchadiens. C’est un grand bénéfice pour tous ceux qui sont dans ce pays et qui aiment le Tchad. »

Pendant ce temps, le PIB par habitant est passé de 220,8 dollars en 2002 à 880 dollars en 2019, ce qui a réduit le fort retard avec le reste de l’Afrique subsaharienne. Mais très vite, l’argent du pétrole n’est plus allé vers le développement mais à l’achat d’armements « pour assurer la sécurité du pays ».

Priorité aux dépenses d’armement

Selon l’ONG CCFD-Terre solidaire, les dépenses militaires du Tchad ont été multipliées par près de huit de 2004 à 2010 : elles sont ainsi « passées de 45,3 milliards de francs CFA (53 millions d’euros) à 275,7 milliards (420 millions d’euros) ». Durant cette période, mal élu et peu populaire, « le président à vie » était en butte à de nombreux mouvements rebelles. Mais les dépenses militaires ont continué de plus belle face à Boko Haram et aux autres groupes terroristes de la région.

Au Tchad, l’armée est toujours passée avant l’éducation et la santé, et la violence au Sahel n’a rien arrangé. Résultat : aujourd’hui, le pays est toujours en queue de peloton (186e place sur 188) de l’indice de développement humain (IDH) mis en place par l’ONU.

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