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Tchad: intimidations, tirs à balles réelles, enlèvements, séquestrations, tortures,… quand les forces de l’ordre deviennent hors-la-loi

(N’Djaména, 3 mars 2017) – Les stigmates de la violence policière demeurent encore vivaces dans l’esprit de quelques enseignants et responsables rencontrés par Djimet Wiche Wahili du journal Alwihdainfo au lycée de Walia dans le 9ème arrondissement de N’Djaména. L’odeur de gaz lacrymogène est encore présente dans toute l’administration 24 heures après les incidents et l’on peine à ouvrir les yeux.

Selon une information reccueillie auprès d’un enseignant du lycée de Walia, quelques étudiants sont venus siffler ce mercredi 1er mars aux environs de 10h30, et quelques élèves curieux sont sortis de leur classe pour voir ce qui se passait dans la cour. Avant d’ajouter que la police est arrivée aussitôt et a commencé à tirer sans discernement, sans que les élèves ne soient impliqués.

Plusieurs élèves sont tombés et se sont évanouis dans la cour lors de l’affrontement entre étudiants et policiers par cailloux et gaz lacrymogènes interposés.

La proviseur du Lycée de Walia, Djoungoun Cathie a été admise à l’Hôpital de l’Ordre de Malte après avoir été aspergée de gaz lacrymogène tiré par la police qu’elle avait reçue dans son bureau. Le censeur du Lycée de Walia affirme que l’intervention musclée de la police n’a pas entraîné de pertes en vie humaine dans le rang des élèves. « Beaucoup des élèves ont perdu connaissance dans la cour tandis que d’autres sont admis à l’Hôpital. Les élèves, à chaque fois, se replient tout près du drapeau national pour entonner l’hymne nationale. Un policier est venu casser le mat pour enlever le drapeau. C’est un acte incivique de la part d’un agent de l’ordre de se comporter ainsi. Nous avons reçu des tirs nourris de gaz lacrymogènes des policiers dans nos bureaux respectifs parce qu’il y a des élèves qui y ont trouvé refuge », a confié un autre enseignant.

Quelques motos et vélos abandonnés par les élèves sont encore parqués dans l’enceinte de l’administration. Le mot d’ordre de la suspension des cours lancée par la coordination des cellules du lycée de Walia affiliée au Syndicat des Enseignants du Tchad, pour protester contre la violente intervention de la police au sein dudit lycée, semble être bien suivie ce jeudi matin.

Il faut rappeler que des peines d’un mois de prison ferme pour « outrage à l’autorité de l’État » ont été prononcées ce mardi à l’encontre de 69 étudiants de l’université de Toukra. Ils sont accusés d’avoir perturbé une visite ministérielle alors que les universités grondent contre la suppression des bourses. Leur interpellation samedi dernier faisait suite à la visite mouvementée sur le campus de Toukra du ministre de l’Enseignement supérieur, Mackaye Hassane Taisso, accompagné de son homologue sénégalais. Tous deux avaient alors été copieusement hués et leurs voitures officielles ciblées par des jets de pierres. Cet incident avait provoqué l’intervention de la police, qui avait dispersé les étudiants en faisant usage de grenades lacrymogènes.

À l’image de larges secteurs de la société tchadienne, les universités sont en ébullition après l’annonce par le gouvernement de mesures d’austérité, qui se sont traduites par la suppression des bourses pour étudiants.

Dimanche dernier, Daniel Ngadjadoum, directeur de cabinet de l’opposant Yorongar, convoqué à la police il y a quelques jours, a été enlevé à sa sortie d’église par des inconnus. «J’ai été libéré mercredi à 12h00 sur ordre du procureur», a indiqué M. Ngadjadoum joint par téléphone à N’Djaména par l’AFP depuis Libreville. À en croire ses dires, il aurait été menacé par le directeur général de l’ANS. «Le directeur général de l’ANS m’a demandé pourquoi j’ai écrit un article intitulé, Idriss Déby, un président poker-menteur. Je lui ai fourni des explications qui l’ont convaincu. Il m’a demandé d‘écrire une lettre d’excuse à la République. J’ai accepté sous sa menace», a fait savoir le collaborateur du journal Tribune Info. « J’ai été enchaîné et menotté, j’ai été torturé et séquestré. Je vais porter plainte contre le directeur de l’ANS pour enlèvement, torture et séquestration », a-t-il déclaré dans une interview accordée à la Deutsche Welle.

« Reporters Sans Frontières (RSF) se joint à l’Union des journalistes tchadiens (UJT) pour dénoncer l’enlèvement dimanche de Daniel Ngadjadoum ainsi que les intimidations à l’encontre de deux autres journalistes tchadiens, Eric Kokinangué et Malachie Dionbé, par l’Agence nationale de sécurité (ANS) », écrit l’association de défense de la liberté de la presse dans un communiqué reçu mercredi par l’AFP. Dans son communiqué, RSF accuse directement l’agence de renseignements dépendant « directement » de la présidence d’Idriss Déby Itno.

Dans un communiqué de presse intitulée « halte aux enlèvements et à la répression des citoyens », la Ligue Tchadienne des Droits de l’Homme (LTDH) a dénoncé la dégradation de la situation des droits de l’homme dans toutes les localités du pays et devient de plus en plus inquiétante: Interdictions des libertés publiques, accentuation des conflits communautaires, arrestations arbitraires, répressions sanglantes de toutes manifestations, enlèvements par des groupes inconnus et de l’ANS, police politique du régime. Le document précise que tous les enlèvements sont menés avec le même mode opératoire à savoir: véhicules banalisés et sans immatriculations et à bord des personnes en tenue militaire et civile en armes de guerre; détentions des victimes dans des prisons parallèles sans accès à leurs familles et encore moins aux avocats, arrestation sans mandat d’amener délivré par la justice.

TchadConvergence

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